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Le quotidien d'un directeur d'école
21 février 2007

Devoirs de vacance 1 : Ségolène

Profitons des vacances pour prendre un peu de recul et décortiquer les propositions des candidats à la présidentielle sur l'école. Honneur aux dames, le discours de Dunkerque sur ctte question: Ségolène Royal : " Vous le savez, je le dis souvent, parce que c’est vrai, tout se tient : le travail, la famille, le logement, et enfin l’éducation. J’ai choisi ce soir, à Dunkerque, de vous parler d’éducation. Car après avoir présenté le 11 février dernier le pacte présidentiel, je vais maintenant à travers la France pour approfondir les thèmes : aujourd’hui à Dunkerque sur l’éducation, demain à Strasbourg sur la recherche, la semaine prochaine à Rennes sur le travail et sur l’emploi. Alors je l’ai dit et je le redis ici à Dunkerque, l’éducation, encore l’éducation, toujours l’éducation, au cœur de tout et en avant de tout ! Ce sera le cœur de notre pacte présidentiel. Je le redis devant Jack Lang, en effet, qui observe avec nous tous, jour après jour, le démantèlement des moyens. L’école, en France, c’est l’âme du pays. L’école, en France, c’est ce qui a donné à la Nation le sentiment de son unité. L’école, en France, c’est ce qui a enraciné la République dans les consciences et dans les mœurs. L’école, c’est la grande institution qui a montré à tous les enfants de France, et donc à tous les futurs citoyens, que le travail et le mérite pouvaient être récompensés et qu’ils pouvaient peser plus lourd que le seul privilège de la naissance. L’école, en France, ce n’est pas seulement l’école, c’est le creuset, la matrice, le principe de tout le reste. Alors que ceux qui vilipendent la faillite de notre système, et qui d’ailleurs en sont parfois à l’origine, de ce démantèlement, en sont même toujours, qu’ils aient bien cette vérité en mémoire, qu’ils sachent, ceux qui prétendent que le niveau baisse, qu’ils n’oublient jamais qu’il y a eu là une grande révolution silencieuse, qui n’est certes pas achevée, et qui ne le sera peut-être jamais tout à fait, mais qui a changé le visage de notre pays et que l’on doit aux générations d’enseignants. Les 3 % de bacheliers dans les années 30 sont aujourd’hui vingt fois plus nombreux. Rien que dans les vingt dernières années, le nombre de nos étudiants a doublé. Nous sommes un pays où, grâce à l’école, grâce à la compétence, au dévouement au niveau de ses enseignants, les quatre cinquièmes des enfants arrivent dans la vie adulte avec une qualification ou un diplôme. Peu d’institutions ont été au bout du compte aussi fidèles à leurs missions. Peu d’institutions se sont, contrairement à l’idée reçue, autant transformées, réformées, adaptées pour tenir compte des contraintes nouvelles, de la mutation des jeunes et continuer à remplir leur mission. Oui, je vous le dis, la France demeure l’une des premières nations au monde, si elle conserve son éclat, son rayonnement et son dynamisme, elle le doit en grande partie à son école et à ceux qui enseignent. Oui, c’est la première chose que je voulais vous dire. La culpabilisation, ça suffit ! Nous pouvons être fiers de notre école. Nous devons être fiers de tous ceux qui y travaillent et qui s’y dévouent sans relâche. C’est vrai aussi que, depuis quelques années, l’école de la République connaît une crise. C’est vrai que, depuis quelques années, l’école de la République s’est démoralisée. Que s’est-il passé ? Les politiques de droite n’ont rien arrangé. La droite, en cinq ans, a détruit 125 000 emplois de professeurs, d’aides éducateurs, de médecins scolaires et de surveillants. Maintenant que les élections arrivent, elle leur promet bien sûr tout le contraire. Elle leur promet les salaires, la progression de carrières, les retraites revalorisées et le reste. C’est la foire aux promesses, c’est le tourbillon de la démagogie, et c’est surtout très dangereux, cet écart entre le discours et les actes, de la part de ceux qui ont déstabilisé, affaibli, amoindri l’éducation, démoralisé l’éducation, en lui retirant pendant cinq ans, année après année, tous ses moyens. Quel mépris que de prétendre que si la droite revient au pouvoir, elle ne remplacera plus un fonctionnaire sur deux, et donc un professeur sur deux ! Peut-on accepter la disparition programmée de 300 autres postes d’enseignants ? Parce que c’est cela que ça veut dire. Peut-on accepter ce qui est dans le programme du candidat sortant de l’UMP, la suppression des ZEP ? Est-ce que c’est sérieux ? Est-ce que c’est dangereux ? Oui, c’est dangereux de mettre les écoles en concurrence et d’instituer la sélection par l’argent à l’entrée des universités. Comment le candidat de l’UMP sortant peut-il être crédible en promettant des moyens nouveaux, alors que c’est tout le contraire qui vient d’être fait ? S’il est une fierté d’être socialiste et d’être à gauche, c’est la première place que nous avons toujours, toujours accordée à la question éducative, et cette première place, l’éducation la retrouvera. Nous avons été de tous les combats en faveur de l’école publique et laïque. Nous n’avons jamais douté que l’accès à la citoyenneté et l’accès de chaque futur citoyen à la liberté de penser et à la liberté tout court passaient par le renforcement de l’école. Et de cela, je crois vraiment que nous pouvons, que nous devons être fiers. Je suis fière qu’avec François Mitterrand, nous ayons donné à l'Éducation nationale le premier budget de la Nation, et qu’avec tous les ministres socialistes qui ont, au cours de ces années, doublé le nombre de bacheliers, revalorisé le métier des enseignants, lancé un plan pluriannuel de recrutement. Nous n’avons pas le monopole de l’école, bien évidemment, mais nous avons le mérite de la constance et nous avons la preuve des résultats et de la volonté politique. C’est forte de cette constance et de cette volonté politique que je veux vous parler aujourd’hui de l’école. J’ai entendu, dans tous ces débats, la profonde demande de reconnaissance. Ah, la reconnaissance ! C’est le mot qui est le plus fréquemment revenu dans les débats en venant des équipes éducatives. D’abord, je ne veux plus entendre tous ces discours qui contestent la valeur et l’engagement de nos enseignants. Je ne veux plus entendre, comme aujourd’hui, qu’on a trop donné à l’école et que son budget ne vaut pas ses résultats, car sans cet investissement, sans le lien de chair et d’esprit de la République et de son école, où en serions-nous ? Combien aurions-nous de jeunes à la dérive ? Combien de familles seraient à l’abandon ? Quand je vous rencontre, vous les enseignants, ce qui me frappe, c’est le moral qui baisse, malgré votre foi dans votre mission et votre ardeur à la tâche. Ce qui me frappe, c’est face à l’immensité de votre rôle, et face aux difficultés que vous avez à le remplir dans un environnement urbain et familial qui n’est plus, hélas, celui des enfants sages et des hussards noirs de la République, c’est votre humilité et votre refus de l’esprit de système. Ce qui me frappe, c’est que vous avez conscience que les chocs culturels auxquels vous êtes confrontés ne trouvent plus leurs réponses dans les solutions toutes faites. Vous cherchez, parfois vous tâtonnez, mais vous trouvez. Et le devoir de la République c’est vous aider à inventer. Je veux une société qui reconnaisse l’expérimentation et qui vous laisse libres, plus libres de vos méthodes pédagogiques, sans inspection tatillonne. Je veux, autour de l’école, pour vous y aider, une société de la connaissance, où le savoir vaut plus que l’apparence. Je veux autour de l’école une société d’intelligence, où l’esprit de service public domine l’intérêt mercantile. Je veux des écoles, des lycées, des collèges où l’on continuera longtemps encore de concilier l’égalité et le mérite, la solidarité et l’émulation, la citoyenneté et l’esprit critique, les classiques et le progrès technologique. Je veux autour de l’école une société qui promeut l’intelligence collective sans tarir les talents individuels, qui relève les défis du monde plutôt que d’en avoir peur. Je veux une politique de l’école qui ira de la Sorbonne aux Minguettes, et qui donnera la même chance à Frédéric et à Malika. Je veux tout cela en sachant que vous le voulez aussi. Je veux que nous continuions ensemble cette lignée de la gauche qui va de Condorcet à Jean Jaurès, de Paul Bert à Jean Zay et Ferdinand Buisson, du plan Langevin Vallon au plan Université 2000. Je veux, avec vous, faire que l’éducation reste au centre de la République, une, laïque et indivisible. Je voudrais dire à l’école et à ceux qui enseignent que c’est grâce à vous que je suis là devant vous. C’est grâce à mon amour de l’école, où j’ai compris très tôt, dès le collège rural des Vosges, avec mes enseignants PEGC, je me souviens encore de leur visage, c’est là que j’ai compris, dans le travail scolaire, que j’allais trouver la chance de mon émancipation. Moi qui viens d’une famille nombreuse traditionaliste, où les filles étaient destinées aux tâches domestiques où il était considéré que les études après le baccalauréat étaient inutiles à notre fonction naturelle féminine. Ce sont mes professeurs qui m’ont poussée, motivée, encouragée, poussée en avant, pour que, après le baccalauréat, je puisse engager des études supérieures, et je voudrais ici leur témoigner de ma reconnaissance. Et l’école juste, c’est d’abord une école où il fait bon vivre. L’école juste, ce n’est pas seulement une école qui permettra à quelques enfants issus des quartiers populaires d’accéder aux grandes écoles, c’est utile, c’est important, mais cela ne suffira pas. C’est l’école qui donne la meilleure formation possible, non pas aux seuls boursiers de la République, mais à tous les élèves de France, c’est l’école qui diversifie les chemins qui mènent à la connaissance, et c’est l’école qui, en même temps, offre une culture commune car la valeur et la compétitivité d’un pays ne se mesurent pas seulement au nombre de ses prix Nobel. Elle a besoin de prix Nobel naturellement, l’excellence est toujours comme la preuve ultime de la très grande qualité d’un système, mais la vraie valeur d’un pays, elle se mesure d’abord à la qualité de la culture et de l’éducation prodiguée à tous ses citoyens. C’est cette vision que je veux porter, c’est cette vision que je veux partager avec toute la communauté éducative et pour que la gauche au pouvoir continue l’école de la République, c’est-à-dire l’excellence pour le plus grand nombre. Je voudrais m’adresser aux enseignants, comme je viens de le faire, mais je pense aussi aux personnels éducatifs non enseignants, aux chefs d’établissement, et dans le pacte de la réussite éducative que je vous propose, je voudrais dire à tous que l’État vous garantira les moyens de votre mission. Si je suis élue Présidente de la République, j’ai un devoir imprescriptible envers vous, et ce devoir sera de garantir les moyens de votre mission car vous recevez aujourd’hui de plein fouet les effets de la crise sociale. Vous êtes les premiers à devoir faire face aux légitimes inquiétudes des parents, aux souffrances des élèves et à leur découragement. Vous êtes aussi en première ligne des nouvelles formes d’agressivité et de violence, et l’école doit être partout un lieu de paix. Aucune atteinte à votre autorité ne doit être acceptée. La puissance publique se tiendra en toutes circonstances à vos côtés, elle fera tout pour protéger l’école des coups qui lui sont déjà portés, que ces coups viennent du dehors ou parfois hélas du dedans. Vous serez épaulés chaque fois que vous en aurez besoin. Notre école doit être l’école du respect, et ce respect sera d’abord le respect qui vous est dû, vous qui transmettez les savoirs, les lumières et l’esprit citoyen. A chaque élève, il faut offrir sa chance, mais à chaque enseignant, il faut reconnaître son autorité, et à chaque parent, il faut donner sa place. Je veux une harmonie réciproque entre l’école et les parents. Je m’engage à organiser les États généraux de la réussite scolaire dès le mois de mai 2007 car j’ai décidé de rétablir pour la rentrée 2007 les moyens qui ont été retirés à l’école. Et je veux, dans le cadre de ces États généraux, avec vous, enseignants, chefs d’établissement, personnels non enseignants, parents d’élèves, décider de la façon la plus efficace de répartir ces moyens pour améliorer les conditions de travail d’un côté et la réussite des élèves de l’autre. Le pacte de la réussite éducative que je vous propose reposera également sur la stabilité dans la durée des moyens financiers et humains investis à l’école, dans le primaire et dans le secondaire, parce qu’il faut une continuité dans l’effort, et je souhaite en particulier que soit renforcée la formation des enseignants parce que le creuset de la République ne peut voir son destin dépendre des caprices de la conjoncture économique ; parce que faire du parcours éducatif une variable d’ajustement budgétaire est un scandale quand des dizaines de milliers d’enfants sortent encore chaque année du système sans la moindre qualification et que tant d’établissements souffrent du besoin de professeurs, de surveillants, de personnels médicaux, de psychologues, de conseillers d’orientation, de CPE, de personnels ouvriers et de services. C’est pourquoi je veux que la reconnaissance de la Nation à ces enseignants ne soit pas que symbolique, je veux qu’elle se traduise sur leur pouvoir d’achat, dans leurs évolutions de carrière et dans leur formation. Cette révolution nécessaire s’accompagnera d’une rénovation des pratiques et du métier d’enseignant. Et c’est pour assurer cette sécurité au long court que je m’engage à édicter un plan pluriannuel de pré-recrutement, de recrutement et de création d’emplois. Nous ferons voter au Parlement une loi de programmation et nous stabiliserons sur les cinq années de la législature les moyens pour sécuriser, apaiser, harmoniser les relations entre l’école et la nation car en voilà assez des angoisses, des fermetures de classes, des redéploiements qui frappent le système scolaire à chaque rentrée scolaire. Je crois que le moment est venu de procéder autrement, je crois que le moment est venu là aussi de nouer un pacte présidentiel avec le système scolaire pour qu’il soit assuré sur la durée, et les élus locaux aussi qui sont en première ligne souvent des batailles scolaires contre la fermeture des écoles, et les élèves, et les parents d’élèves qui veulent aussi pouvoir compter sur la stabilité et sur la sécurisation des moyens. Mais je veux aussi parler le langage de vérité à la communauté éducative. Des établissements ont davantage besoin de soutien que d’autres, et l'Éducation nationale doit avoir l’audace de rompre avec les approches uniformes, et je l’ai dit tout à l’heure, et je le répète, elle doit pouvoir favoriser des pédagogies sur mesure, du soutien individualisé en favorisant le travail en équipe et l’expérimentation. Cela commence, cette bataille pour la réussite scolaire, très tôt, et c’est pourquoi le pacte que je vous propose établira la scolarité obligatoire à trois ans et instituera, avant cet âge, un service public de la petite enfance. C’est là que se trouve la première inégalité entre les familles. C’est là, dès le plus jeune âge, la plus criante des inégalités. Le nombre de mots compris par un enfant à l’entrée du cours préparatoire peut varier, suivant l’origine familiale, de 600 à 1 800 mots. De tels écarts sont porteurs d’inégalités toute la vie, et l’école, c’est sa mission la plus noble, peut réparer ces inégalités et doit en avoir les moyens, car je veux, moi, un système éducatif où chaque enfant aura le même droit d’être soutenu pour faire ce devoir. Je veux que l’école soit ouverte et que soient généralisées les expériences école ouverte pour épauler ceux qui en ont le plus besoin après les heures de cours. Je veux que le soutien scolaire individualisé soit gratuit dans l’école de la République, et cela sera la véritable révolution éducative. Et je veux naturellement que les enseignants qui consacrent leur temps à ce soutien aient droit à une rémunération supplémentaire et disposent de locaux pour accomplir leur mission. Je veux également qu’ils puissent faire appel à des personnels supplémentaires qui puissent les aider dans ce travail individualisé. Oui, il faudra établir un système de soutien partout où il y en a besoin pour raccrocher les élèves qui décrochent, c’est cela l’ordre éducatif juste que l’on doit aux enfants, aux parents, car c’est à la puissance publique de réparer les injustices nées de la société, de même que c’est à la puissance publique d’établir et de garantir une vraie gratuité et d’interdire les obligations d’achat que l’on trouve encore trop souvent même à l’école élémentaire. Et j’en prends ici l’engagement : l’école de la République sera partout totalement gratuite. Des centaines de milliers d’enfants et d’adolescents vivent chez eux une misère sociale et culturelle, et là se trouvent les racines de l’échec scolaire. Comment bien préparer ses devoirs quand le bruit empêche la concentration, quand l’enfant partage sa chambre avec plusieurs frères et sœurs, quand il doit dormir dans la pièce commune, quand il est gavé de mauvaise télévision ? Comment demander l’excellence à des enfants qui ont mal dormi, mal ou trop peu mangé ? Là aussi, c’est le rôle de la puissance publique d’agir, et on le voit bien, les politiques scolaires vont de pair avec les politiques de la ville et avec les politiques du logement social et de la mixité urbaine. L’un ne va pas sans l’autre. C’est pourquoi la priorité donnée au logement social est aussi à la source de la lutte contre les inégalités scolaires. Puis, le pacte de la réussite éducative, c’est refuser que la vie d’un adolescent soit déterminée à quatorze ans dans l’apprentissage. Ce que je veux, c’est insérer l’apprentissage dans le parcours scolaire, c’est initier tous les collégiens au travail manuel et à toutes les formes d’intelligence. Je crois, oui, que toutes les formes d’intelligence conceptuelle, concrète, sensible, manuelle s’imbriquent et se nourrissent l’une de l’autre. Ce que je veux, c’est repenser les mécanismes d’orientation dans ce qu’ils peuvent d’avoir d’irréversible et de brutal. Nous ménagerons des cycles de transition, nous éviterons tant que faire se peut les passages chocs, nous instituerons des lycées des métiers où, peu à peu, au fil des cycles, la même noblesse ira aux filières techniques et professionnelles qu’aux filières classiques. Je veux qu’un jeune qui apprend à dessiner le plan d’une turbine soit aussi bien considéré qu’un jeune qui récite Antigone. Je veux que l’apprentissage soit une voie de formation véritable permettant de mettre le pied dans une formation qualifiante et ouverte et que cet apprentissage soit aussi diffusé par les lycées publics pour déboucher sur l’emploi et sur la réussite. Et puis d’autres chantiers nous attentent, et notamment assurer la pleine maîtrise de notre langue nationale pour chaque enfant de ce pays, c’est la clé de tout, la passion, l’amour de la langue française : d’elle, tout procède, et vers elle, tout converge. Elle est la colonne vertébrale de notre école, elle est le savoir des savoirs, la porte qui ouvre aux autres disciplines. C’est par elle et pour elle que le cœur de l’école doit battre jour après jour, notre langue française, car un enfant qui n’accède pas à la maîtrise de la langue est un enfant blessé, et un enfant blessé est un enfant exclu, et un enfant exclu est un enfant qui, demain, faute d’utiliser le pouvoir des mots, sera tenté d’utiliser le pouvoir des coups. Alors penser un plan aussi pour les arts à l’école, de la maternelle à l’université, c’est un enjeu majeur, et je le dis solennellement, tout enfant de ce pays a droit non seulement à l’alphabétisation culturelle, mais à l’initiation à un art. Ce que Jules Ferry a réalisé pour la lecture et le calcul, je le ferai pour l’éducation artistique. Je voudrais que cela soit fait dans toutes les écoles de France. Je crois que nous pouvons, en réhabilitant ce qu’on appelait jadis les humanités, en redonnant toute sa place à la culture dite générale, c’est-à-dire à la culture tout court, je crois que nous pouvons infuser dans toutes les écoles l’esprit des maisons de la culture. Et puis je me suis exprimée sur le sport ce matin devant le Comité national olympique et sportif français, et suite aux manifestations des enseignants, aux jeunes qui ont été engagés dans les STAPS avec la diminution de 70 % des CAPES dans cette profession indispensable parce que c’est d’abord par le sport que nous lutterons pour l’intégration, que nous lutterons contre toutes les formes de discrimination, que nous lutterons pour la tranquillité et pour l’harmonie à l’intérieur de l’école. Et je l’ai dit, je le répète ici, non seulement le budget des sports sera doublé, mais les moyens qui ont été retirés à l’UNSS seront rétablis parce que les enseignants ont le droit de se voir reconnaître le travail sportif en périscolaire, et le retrait de 70 % des postes au CAPES d’éducation physique et sportive seront rétablis et seront remis à niveau pour tous les jeunes qui se sont engagés sur la base de promesses fallacieuses dans ces filières et qui, aujourd’hui, n’ont pas de débouché, demain, ils retrouveront ces débouchés parce que les écoles, les élèves, les adolescents n’ont jamais eu autant besoin qu’aujourd’hui d’accéder à la pratique sportive. Le pacte de la réussite éducative, c’est également d’engager une loi d’orientation et de programmation pour l’enseignement supérieur. Et j’aurai l’occasion demain de m’exprimer sur ce sujet en articulant l’enseignement supérieur et la recherche. A un moment où les Français regardent et comparent les modèles de société qui leur sont proposés pour l’élection présidentielle, je voudrais insister, mais vous l’avez compris déjà, sur la différence qui oppose projets contre projets, vision de la société contre vision de la société, par ce retour en force de la priorité de l'Éducation nationale. Et je voudrais vous dire aussi que les moyens, nous les trouverons car, quand j’entends le candidat de l’UMP demander la construction d’un deuxième porte-avions, je n’y suis pas favorable, je l’ai dit, je l’ai dit et je me suis exprimée sur ce sujet, je maintiendrai inchangé l’effort de défense nationale, parce que nous vivons dans un monde menacé dans le cadre duquel la France ne peut pas baisser la garde, ni son effort de défense. Mais je n’engagerai pas la construction d’un deuxième porte-avions car je considère que cet équipement doit se faire dans le cadre de l’émergence d’une défense européenne et doit devenir un chantier européen. Alors, si la Nation est capable de dégager le coût d’un deuxième porte-avions, j’en fais ici le serment, cette marge de manœuvre supplémentaire, cette valeur-là n’ira pas à la défense nationale, mais ira à l'Éducation nationale. Voilà la différence. Mon autre priorité sera d’inventer réellement la formation tout au long de la vie. Depuis la nuit des temps, notre système éducatif repose sur une césure générationnelle finalement absurde, il s’adresse souvent à la jeunesse, et c’est indispensable, mais s’arrête parfois trop souvent à l’obtention du diplôme. Or, on le sait, l’explosion technologique, la mondialisation des échanges, le chômage de masse qui a accompagné tout cela, ont bouleversé ce schéma. Et on le sait aujourd’hui, puisque les pays qui reconnaissent le chemin de la croissance sont ceux qui investissent massivement dans la formation professionnelle et dans la qualification. C’est pourquoi il est indispensable que les hommes et les femmes d’aujourd’hui aient accès tout au long de la vie à cette formation. Et c’est pourquoi je propose deux choses. D’abord, la création d’un compte éducation-formation dont chacun disposera à la fin de la scolarité obligatoire, et qui sera d’autant mieux doté que la formation initiale aura été insuffisante. Ensuite, l’inscription dans le contrat de travail de périodes de formation qui seront négociées naturellement par les partenaires sociaux, et enfin la Sécurité sociale professionnelle qui comprendra des périodes de formation professionnelle rémunérée lorsque les salariés perdent leur emploi parce que cette formation n’est plus adaptée au marché de l’emploi. Oui, offrir à chaque travailleur, à chaque demandeur d’emploi, le droit et les moyens de s’adapter tout au long de la vie à l’évolution des techniques et des savoirs, c’est le rêve des Républicains. Avec ce rêve, nous commencerons, avec ces actions, à l’inscrire dans la réalité. Et je veux vous le dire maintenant, je veux le dire ici solennellement, à chaque enseignant, à chaque élève, à chaque parent, mais aussi à toute la société, parce que tous les citoyens sont comptables et dépendent d’une certaine façon de la qualité de notre système éducatif et de formation, ce pacte, je le tiendrai parce que je le tiens pour fondateur, mais ni ces réformes, ni les moyens que la Nation y consacrera ne suffiront si chaque citoyen n’y apporte pas son concours actif. Aidez-moi à réussir, enrichissez-moi de votre expérience. Le chantier est vaste, il a besoin de chacun. L’ambition est immense, elle a besoin que chacun et chacune d’entre vous dans ce pacte présidentiel assume sa part d’action et d’effort nécessaire et d’engagement. Et l’école de la République telle que je la conçois, c’est l’école de la responsabilité, et la responsabilité c’est sans cesse renouveler et dépasser les intérêts personnels ou catégoriels, car c’est avec elle, avec cette volonté partagée, avec ce dépassement de soi, que l’école de la République trouvera la force de renouer avec son génie et de continuer sa longue et belle histoire. Et c’est parce que je crois en l’intelligence du peuple français, parce que nous connaissons son talent, parce que je sais qu’il n’est jamais si profondément lui-même que lorsque le sol paraît se dérober sous ses pas, que je suis convaincue qu’il entendra cet appel et qui, au-delà de cette salle mais avec cette salle magnifique, portera avec moi cette grande idée d’une école de tous, d’une école pour tous, et d’une école pour toute l’existence. Et la France possède tous les atouts pour gagner cette bataille mondiale de l’intelligence. La France est équipée pour figurer au tout premier rang de cette bataille qui est celle de la transmission des savoirs. Alors je vous le demande : portez ces paroles, portez ce pacte, saisissez-vous-en, allez vers les citoyens car c’est de notre avenir commun qu’il s’agit, c’est d’une volonté farouche de changer vraiment ce qui se passe aujourd’hui en France, c’est d’une exigence, c’est parfois un cri, une attente désespérée de quelque chose qui ne vient pas et qui va enfin finir par arriver, cette France plus juste, cette France plus forte, cette France du respect pour chacun et du progrès social pour tous, cette France du refus des violences, des inégalités, des précarités, des mépris de toutes sortes, cette France des mensonges, cette France de l’immoralité, cette France du mélange des genres et des pouvoirs, cette France qui mérite mieux que ce qu’elle a. Je le sens aujourd’hui, le peuple de France, il est là, à Dunkerque, devant moi, il a envie que ça change, il a envie que nous réussissions, il a envie que la France se relève. Avec vous je sais que cela devient possible. Seule je ne peux rien, mais avec vous, ce changement arrive, ce souffle, il est là, le peuple le voudra, le peuple doit se mettre en mouvement car il attend des millions d’hommes et de femmes qui hésitent à revenir vers les urnes. Je leur dis : revenez vers les urnes. Toutes ces catégories populaires qui ne croyaient plus dans la politique et qui hésitent encore, qui regardent, qui attendent, portez-leur le pacte présidentiel, montrez-leur qu’il y a une révolution profonde, une autre façon de voir les choses, une autre façon de remettre les valeurs humaines au cœur de tout et en avant de tout, et en tout premier lieu cette éducation, c’est-à-dire cet investissement dans la génération qui se lève. Je fais appel à toutes les générations, celle qui se lève, mais aussi la génération des anciens qui a envie de transmettre à la nouvelle génération les valeurs auxquelles nous tenons car la politique, c’est d’abord cela : transmettre à la génération qui vient des valeurs fondamentales, des sécurités, des dignités pour que, à son tour, cette génération puisse transmettre à la génération suivante. Voilà le pacte présidentiel que je vous propose, celui de la transmission des valeurs, des savoirs, des confiances, pour que demain, la France soit plus belle et soit plus forte. Alors, en avant, je vous fais confiance, vive la France, vive la République et vive l’école."
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Commentaires
P
Et vous arrivez à gober tout ça sans rire ou sans humeur??
Y
Gloups, je n'ai vraiment pas le courage de lire toute cette tartine, désolée !
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